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FIPECO le 15.03.2024                                           

Les fiches de l’encyclopédie                                            IX) Les autres politiques publiques

7) Les dépenses militaires

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Les orientations stratégiques à long terme en matière de défense et de sécurité font, depuis 1972, l’objet de « livres blancs » ou de « revues stratégiques » dont les derniers dataient de 2013 et 2017. Une nouvelle revue stratégique a été présentée le 9 novembre 2022. Ces livres et revues définissent le « format » des armées (effectifs, équipements, organisation) arrêté par le Président de la République pour répondre aux menaces des années à venir. Les ressources budgétaires nécessaires sont ensuite inscrites dans des « lois de programmation militaire » pluriannuelles votées par le Parlement. En application du principe budgétaire d’annualité, ces lois de programmation n’ont toutefois pas de portée juridique supérieure à celle des lois de finances annuelles, qui peuvent donc retenir un montant inférieur de crédits.

Cette fiche présente les grandes orientations de la programmation des dépenses militaires pour les années 2018 à 2023, les dépenses exécutées de 2019 à 2022, les crédits inscrits dans les lois de finances pour 2023 et 2024, le décret d’annulation de février 2024 et la loi de programmation du 1er août 2023 pour les années 2024 à 2030. Cette fiche fournit enfin quelques éléments de comparaison internationale pour les années 2005 à 2021.

A) La programmation pour les années 2018 à 2023

Les crédits de la mission Défense pour les années 2018 à 2023 ont été inscrits d’abord dans la loi de programmation des finances publiques de janvier 2018 pour les années 2018 à 2022, puis dans la loi de programmation militaire du 13 juillet 2018 pour les années 2019 à 2025. Ils étaient supposés traduire l’engagement présidentiel de porter les dépenses militaires à 2,0 % du PIB en 2025, conformément à un objectif fixé par l’OTAN à ses membres. Toutefois, si la loi de programmation militaire portait sur les années 2019 à 2025, son volet budgétaire s’arrêtait en 2023.

Une augmentation de 1,7 Md€ par an était prévue sur la période 2018-2022 puis une hausse de 3,0 Md€ en 2023, au-delà de la programmation des finances publiques et du quinquennat. Ces crédits devaient ainsi atteindre 44,0 Md€ en 2023, soit 1,6 % du PIB de 2023 tel qu’il était prévu dans le programme de stabilité d’avril 2018.

La programmation 2017-2023 des crédits de paiement de la mission Défense

 

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

En Md€

32,7

34,2

35,9

37,6

39,3

41,0

44,0

En % du PIB

1,4

1,4

1,5

1,5

1,5

1,5

1,6

Source : loi de programmation des finances publiques et loi de programmation militaire ; crédits hors pensions et gendarmerie ; FIPECO

L’exposé des motifs du projet de loi de programmation militaire précisait que les 44 Md€ de crédits prévus pour 2023 représentaient 1,9 % du PIB, mais le montant de 44 Md€ correspondait aux crédits hors pensions alors que le ratio de 1,9 % du PIB a pour numérateur les crédits pensions comprises, conformément aux règles comptables de l’OTAN.

Ces crédits incluaient une provision au titre des opérations extérieures et des missions intérieures qui était relevée progressivement de 450 M€ en 2016 à 1 100 M€ en 2020 et au-delà.

Une augmentation de 3 000 équivalents temps pleins des effectifs du ministère des armées était également prévue, dont la moitié en 2023. Ils devaient ainsi passer de 266 000 en 2016 à 270 000 en 2023.

L’augmentation annuelle programmée des effectifs pour 2017-2023

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

460

520

450

300

300

450

1 500

Sources : lois de règlement pour 2017 et 2018 et loi de programmation militaire pour 2019 à 2023 ; effectifs et équivalents temps plein ; FIPECO.

B) Les dépenses de 2017 à 2022

Les crédits consommés en exécution au cours des années 2019 à 2022 ont été supérieurs aux montants prévus par la loi de programmation, du fait du rattachement de fonds de concours jusqu’à 2020 mais aussi parce que les crédits ouverts en loi de finances initiale ont été un peu plus élevés en 2021-2022, surtout pour tenir compte de la hausse des prix.

En 2022, les dépenses de la mission Défense se sont élevées à 51,7 Md€ en exécution (fonds de concours inclus), ce qui représente 2,0 % du PIB. Elles comprenaient 21,5 Md€ de dépenses de personnel, 17,2 Md€ d’autres dépenses de fonctionnement et 12,5 Md€ d’investissements. Au sein des dépenses de personnel, la contribution au financement des pensions s’est élevée à 8,6 Md€ et les autres dépenses ont donc atteint 43,1 Md€, soit 1,6 % du PIB et 2,1 Md€ de plus que prévu dans la loi de programmation militaire.

En 2021, les effectifs étaient d’environ 271 000, en hausse de 687 par rapport à 2020 à périmètre constant (contre 300 prévus en loi de programmation). Ils avaient ainsi déjà dépassé l’objectif fixé par la loi de programmation pour 2023.

Les effectifs étaient d’environ 267 000 en 2022, en baisse de 4 486 par rapport à 2021 à périmètre constant (contre une augmentation de 450 prévue dans la loi de programmation), soit notamment 34 000 officiers, 91 000 sous-officiers, 78 000 militaires du rang et 62 000 civils.

En 2022, les effectifs étaient à peu près au même niveau qu’en 2016 et ce volet de la loi de programmation n’a donc pas été respecté.

Les crédits de paiement de la mission Défense

 

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

Loi de programmation militaire en Md€

32,7

34,2

35,9

37,6

39,3

41,0

44,0

Exécution en Md€

32,7

35,0

36,6

38,3

40,9

43,1

 

Exécution en % du PIB

1,4

1,5

1,5

1,7

1,6

1,6

 

Source : loi de programmation militaire et projets de lois de règlement ; crédits hors pensions et gendarmerie ; le surplus de dépenses en exécution tient surtout à des rattachements de fonds de concours sauf en 2021 et 2022 où le dépassement va au-delà ; FIPECO.

C) Les crédits votés pour 2023 et 2024 et le décret d’annulation de 2024

Les crédits de paiement de la mission Défense s’élèvent à 53,1 Md€ (hors fonds de concours), dont 22,4 Md€ de dépenses de personnel, en incluant les contributions au CAS pensions et à 44,0 Md€ en excluant ces contributions dans la loi de finances pour 2023, conformément à la loi de programmation mais avec des prix plus élevés que prévu en 2018.

Les créations nettes de postes sont de 1 200 à périmètre constant en 2023, moins que prévu par la loi de programmation (450).

La loi de finances pour 2024 prévoit 56,8 Md€ de crédits de paiements (hors fonds de concours), dont 23,2 Md€ de dépenses de personnel, en incluant les contributions au CAS des pensions et 47,3 Md€ en excluant ces contributions, dont 13,7 Md€ de dépenses de personnel, ce qui est conforme à la loi de programmation pour les années 2024 à 2030.

Une diminution des effectifs de 1 000 personnes à périmètre constant est prévue, contre une augmentation de 700 dans la loi de programmation.

Compte-tenu de diverses corrections techniques (changement du périmètre des emplois pris en compte), les effectifs autorisés pour 2024 (plafond d’emplois) sont de 272 000 équivalents temps plein dont 94 000 sous-officiers, 77 000 militaires du rang, 36 000 officiers et 62 000 civils.

Le décret d’annulation de crédits du 21 février 2024 n’annule que 0,1 Md€ de crédits de paiements et d’autorisations d’engagement sur le budget de la mission défense, sur la masse salariale (contribution au CAS pensions incluse). Les crédits de paiement hors pension sont donc ramenés à 47,2 Md€, ce qui est conforme à la loi de programmation militaire.

D) La loi de programmation militaire 2024-2030

La loi de programmation militaire du 1er août 2023 prévoit une augmentation des crédits de paiements de la mission Défense de presque 3,5 Md€ en moyenne par an pour les porter à 56,9 Md€ en 2027 (hors contributions au CAS des pensions), soit 1,8 % du PIB si on retient les prévisions de croissance du PIB de la loi de programmation des finances publiques et 67,4 Md€ en 2030.

La programmation 2024-2030 des crédits de paiement de la mission Défense

 

2024

2025

2026

2027

2028

2029

2030

En Md€

47,2

50,5

53,7

56,9

60,4

63,9

67,4

En % du PIB

1,6

1,7

1,7

1,8

 

 

 

Source : loi de programmation des finances publiques et loi de programmation militaire ; crédits hors pensions et gendarmerie ; FIPECO

Ces crédits pourront être complétés par des « ressources extra budgétaires » provenant de la cession d’immeubles ou de loyers et redevances domaniales qui sont estimés à environ 0,8 Md€ en moyenne par an.

Le financement de l’aide militaire à l’Ukraine doit s’ajouter à ces montants (jusqu’à la loi de finances pour 2024, le fonds de soutien militaire à l’Ukraine était inclus dans les crédits de la mission défense, sachant que l’essentiel de l’aide passe par le budget européen et la contribution de la France à ce budget).

Le coût des opérations extérieures est provisionné dans ces crédits à hauteur de 0,75 Md€ par an. Le dépassement de ce montant doit être financé par des annulations de crédits réparties dans l’ensemble des ministères.

Si le prix des énergies consommées par les armées dépasse les hypothèses retenues pour construire la loi de programmation, des crédits supplémentaires pourront être ouverts.

Les effectifs du ministère (hors volontaires et apprentis) devraient passer de 269 000 équivalents temps plein en 2024 à 272 000 en 2027 et 275 000 en 2030.

L’augmentation annuelle programmée des effectifs pour 2017-2023

2024

2025

2026

2027

2028

2029

2030

700

700

800

900

1 000

1 000

1 200

Sources : loi de programmation militaire ; FIPECO. Effectifs en équivalents temps plein.

Sources : lois de règlement du budget ; loi de programmation militaire de 2023 ; Insee et loi de programmation des finances publiques pour le PIB ; FIPECO. Hors pensions.

E) Les comparaisons internationales

Le graphique suivant montre l’évolution des dépenses militaires, telles que mesurées par les comptes nationaux (où les pensions des militaires sont incluses), de 2005 à 2022 en Europe.

En 2009 et 2010, le rapport des dépenses militaires au PIB a augmenté temporairement dans beaucoup de pays du fait de la baisse du PIB et de dépenses de relance exceptionnelles. Une hausse ponctuelle de ce ratio est également parfois observée en 2020 pour les mêmes raisons.

De 2005 à 2022, en pourcentage du PIB, les dépenses militaires sont restées à peu près au même niveau dans les principaux pays européens et en moyenne dans l’Union européenne. Il n’y a pas eu d’inflexion nette à partir de 2014. Au Royaume-Uni, la tendance précédente à la baisse a été inversée en 2019.

Les dépenses militaires de la France en 2022 (1,8 % du PIB) se situent nettement au-dessus de la moyenne de l’Union européenne (1,3 %). Les pays dont les dépenses sont les plus élevées sont la Grèce (2,6 % du PIB), les pays baltes (autour de 2,2 %) et le Royaume-Uni (2,2 % du PIB).

Source : Eurostat (OTAN pour le Royaume-Uni) ; FIPECO

En 2014, l’OTAN a demandé à ses membres de porter leurs dépenses militaires à au moins 2,0 % du PIB, sans fixer un horizon précis pour atteindre cet objectif. Selon les normes comptables établies par cette organisation, les pensions militaires doivent être incluses dans ces budgets. Dans l’Union européenne, seule la Grèce et les pays baltes avaient atteint cet objectif en 2022. Les dépenses militaires des Etats-Unis représentent 3,4 % de leur PIB en 2022 selon l’OTAN. 

Le budget militaire de la France était très légèrement inférieur à cette cible en 2022 (1,8 % du PIB pensions comprises). Dans un référé de novembre 2017, la Cour des comptes notait toutefois que certaines dépenses ne sont pas incluses dans le budget militaire de la France déclaré à l’OTAN et pourraient l’être, comme les dépenses militaires de la gendarmerie, ce qui pouvait déjà permettre d’afficher le respect de l’objectif de 2,0 % du PIB.

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