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FIPECO, le 28.09.2022                                                                    

Les fiches de l’encyclopédie                                                          I) Les comptes publics

2) La comptabilité budgétaire et la présentation du budget de l’Etat

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La « comptabilité budgétaire » de l’Etat est l’une de ses trois comptabilités, les deux autres étant la « comptabilité générale » et la comptabilité nationale[1]. Les « lois de finances » initiales et rectificatives sont présentées et votées en suivant l’organisation des comptes, les nomenclatures et les principes de la comptabilité budgétaire, tels que définis par la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (la « LOLF »). Les « lois de règlement du budget et d’approbation des comptes » présentent les résultats de leur exécution en respectant cette organisation des comptes, ces nomenclatures et ces principes.

Cette fiche présente l’organisation générale des comptes en comptabilité budgétaire, les nomenclatures des dépenses, les notions de « crédits de paiement et d’autorisations d’engagement » ainsi que les « grands principes budgétaires ». Le ministère des comptes publics publie un recueil beaucoup plus précis des règles de la comptabilité budgétaire de l’Etat qui est disponible en ligne.

A) L’organisation générale des comptes

1) Le budget

Les lois de finances et de règlement distinguent au sein du « budget » :

  • le « budget général », qui regroupe toutes les recettes et dépenses budgétaires, sauf lorsque les recettes sont affectées à des dépenses particulières, les recettes et dépenses concernées étant alors présentées dans des comptes spéciaux ou des budgets annexes ;

 

  • les « comptes spéciaux », qui retracent l’affectation de recettes à des dépenses particulières, sauf celles qui figurent à un budget annexe ;

 

  • les « budgets annexes », qui retracent les recettes et dépenses de services de l’Etat qui ont une activité de production de biens et services donnant lieu au paiement d’un prix ou d’une redevance.

 

Le « résultat budgétaire de l’Etat » (ou « solde budgétaire ») est la somme des soldes du budget général, des budgets annexes et des comptes spéciaux.

Le solde budgétaire dans le projet de loi de finances initiale pour 2023 (Md€)

Résultat budgétaire

Solde du budget général

Solde des budgets annexes

Solde des comptes spéciaux

- 158,5

- 155,0

+ 0,1

              - 3,5

Source : projet de loi de loi de finances initiale pour 2023 ; FIPECO

2) Le budget général

Les recettes du budget général sont constituées de recettes fiscales, de recettes non fiscales et de recettes de fonds de concours.

Les « recettes fiscales » sont « brutes » lorsque les « remboursements » et « dégrèvements » d’impôts n’en sont pas déduits. Les remboursements ont généralement un caractère automatique, par exemple parce que les acomptes versés ont été supérieurs à l’impôt finalement dû ou parce que la TVA déductible est supérieure au montant de la TVA due. Les dégrèvements résultent en général de décisions prises par l’administration fiscale ayant pour effet de diminuer l’impôt dû, à son initiative ou sur réclamation du contribuable. Il peut s’agir de dégrèvements accordés par l’Etat au titre d’impôts locaux. Les « recettes fiscales nettes » sont obtenues après déduction des remboursements et dégrèvements.

Les recettes non fiscales sont constituées des autres recettes du budget général (par exemple, les dividendes versés à l’Etat par des entreprises où il a une participation), hors recettes de fonds de concours.

Les « fonds de concours » permettent d’isoler les ressources versées volontairement à l’Etat par des tiers en vue de contribuer au financement d’actions particulières (la construction d’une route par exemple), ainsi que les dépenses financées par ces ressources. Faute d’un suivi comptable adéquat, ces dépenses sont enregistrées pour un montant égal à celui des recettes. Il existe aussi des « attributions de produits » résultant d’opérations commerciales accessoires à l’activité de certains services qui suivent des règles semblables à celles des fonds de concours.

Les « prélèvements sur recettes » sont constitués des versements de l’Etat au profit de l’Union européenne (pour financer le budget communautaire) et de certains versements aux collectivités locales, comme la dotation globale de fonctionnement. Ils sont comptabilisés en déduction des « recettes brutes » pour former les « recettes nettes » du budget général alors qu’il s’agit économiquement de dépenses. Il n’y a d’ailleurs pas de « prélèvement » sur des recettes particulières identifiables.

Les « dépenses brutes » du budget général incluent les remboursements et dégrèvements, alors que certains remboursements, correspondant par exemple à des acomptes supérieurs à l’impôt dû, relèvent de la mécanique de paiement de l’impôt et ont peu de rapport avec des dépenses. Les « dépenses nettes » sont obtenues après déduction des remboursements et dégrèvements.

Le budget général dans le projet de loi de finances initiale pour 2023 (Md€)

Recettes fiscales nettes (1)

318,9

Dépenses nettes (6)

436,5

Recettes non fiscales (2)

30,8

 

 

Recettes des fonds de concours et attribution de produits (3)

5,2

Dépenses des fonds de concours et attribution de produits (7)

5,2

Prélèvements sur recettes (4)

68,3

 

 

Recettes nettes (5=1+2+3-4)

286,7

Dépenses nettes (8=6+7)

441,7

 

 

Solde (5-8)

- 155,0

Source : projet de loi de finances initiale pour 2023 ; FIPECO

A partir du budget pour 2023 et en application de la loi organique du 28 décembre 2021, une distinction est faite entre les recettes et les dépenses de fonctionnement et d’investissement.

3) Les comptes spéciaux

Il existe quatre catégories de comptes spéciaux :

  • les « comptes de commerce », qui retracent des opérations à caractère industriel et commercial effectuées à titre accessoire par des services de l'Etat non dotés de la personnalité morale (par exemple, les activités de production des détenus dans les prisons), parfois pour d’autres services de l’Etat ;

 

  • les « comptes de concours financiers », qui retracent des prêts et avances consentis par l’Etat et leur remboursement ; le plus important est le compte d’avances aux collectivités territoriales sur lequel sont imputés le produit du recouvrement des impôts locaux par l’Etat et leur versement, par avances, aux collectivités locales ;

 

  • les « comptes d’opérations monétaires », qui retracent les opérations liées à l’émission des monnaies métalliques et aux relations avec le Fonds Monétaire International ;

 

  • les « comptes d’affectation spéciale », les plus nombreux, qui retracent, selon la LOLF « dans les conditions prévues par une loi de finances, des opérations budgétaires financées au moyen de recettes particulières qui sont, par nature, en relation directe avec les dépenses concernées ». Ces dépenses ne peuvent pas être des rémunérations.

 

En pratique, un compte d’affectation spéciale (CAS) est ouvert quand le Gouvernement et le Parlement souhaitent affecter des ressources à des dépenses ayant plus ou moins de relations avec ces ressources. Cette affectation est légitime dans certains cas, comme celui du CAS des pensions qui permet de décrire comptablement le fonctionnement du régime de retraite des fonctionnaires et ouvriers de l’Etat. Elle est discutable quand il s’agit surtout de sanctuariser des dépenses en leur affectant des ressources pérennes, comme pour le CAS développement agricole et rural, ou d’échapper aux contraintes liées au respect des normes de dépenses, comme ce fut le cas jusqu’à 2015 pour l’affectation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien à des dépenses militaires. Les ressources et dépenses de cette catégorie de CAS ne se distinguent pas vraiment de celles qui sont inscrites au budget général.

Le solde des recettes et dépenses d’un CAS, cumulées depuis sa création, doit toujours être positif, mais il peut recevoir des versements du budget général, pour certains d’entre eux dans la limite de 10 % des dépenses prévues pour l’année.

Outre celui des pensions, les plus importants CAS sont celui des participations financières de l’Etat, qui enregistre le produit des cessions d’actions et les dépenses liées à l’acquisition d’actions ou à des dotations en capital, et celui des opérations de gestion du patrimoine immobilier de l’Etat.

4) Les budgets annexes

Il n’existe que deux budgets annexes, qui retracent les opérations du service de contrôle de la navigation aérienne et celles de la direction de l’information légale et administrative (Documentation française, journal officiel…).

B) Les nomenclatures de dépenses

1) La nomenclature par programmes et missions

Selon les termes de la LOLF, un « programme » regroupe les crédits destinés à mettre en œuvre une « action » ou un ensemble cohérent d'actions relevant d'un même ministère et auquel sont associés des « objectifs » précis. Les programmes sont eux-mêmes divisés en « budgets opérationnels de programme » qui correspondent aux crédits affectés à des services centraux ou territoriaux.

Dans les lois de finances initiales et rectificatives, les crédits par programme ne comprennent pas les dépenses des fonds de concours qui ne sont présentées que globalement dans le tableau d’équilibre de ces lois de finances. En revanche, les dépenses par programme des lois de règlement comprennent les dépenses des fonds de concours rattachés à ces programmes.

Une « mission » comprend un ensemble de programmes concourant à une politique publique définie. Une mission peut relever d’un ou plusieurs ministères. Les crédits sont votés par mission.

2) La nomenclature par nature des dépenses

Les « titres », au nombre de sept et eux-mêmes divisés en « catégories », regroupent les dépenses d’une même nature :

  • Titre I : dotations des pouvoirs publics (Présidence de la République, Parlement…) ;
  • Titre II : dépenses de personnel ;
  • Titre III : autres dépenses de fonctionnement ;
  • Titre IV : charges de la dette de l’Etat ;
  • Titre V : dépenses d’investissement ;
  • Titre VI : dépenses d’intervention (subventions, prestations sociales…) ;
  • Titre VII : dépenses d’opérations financières (prêts, avances, dotations en capital…), à l’exception des opérations de gestion de la trésorerie qui ne constituent pas des dépenses, ni des recettes, budgétaires.

C) Les crédits de paiement et les autorisations d’engagement

Pour chaque programme, les crédits ouverts comprennent des « autorisations d'engagement » et des « crédits de paiement ».

Un « engagement » est un acte juridique par lequel est créée ou constatée une obligation dont il résultera un paiement, par exemple la signature d’un marché. Les autorisations d'engagement (AE) constituent la limite supérieure des dépenses pouvant être engagées au cours de l’année budgétaire. Un engagement peut obliger l’Etat à payer des dépenses sur plusieurs années.

Si les crédits sont « limitatifs », ce qui est le cas pour la plupart d’entre eux, les crédits de paiement (CP) constituent la limite supérieure des dépenses pouvant être payées pendant l'année pour la couverture des engagements contractés pendant l’année en cours ou les années précédentes. Pour certaines dépenses, comme les charges de la dette, les crédits de paiement sont « évaluatifs », ce qui veut dire qu’ils peuvent être dépassés.

L’Etat tient une double comptabilité budgétaire des dépenses, en AE et en CP. Les lois de finances initiales et rectificatives fixent à la fois des plafonds aux AE et aux CP et les lois de règlement constatent la consommation de ces AE et CP.

La plus importante est la comptabilité en CP. Le solde budgétaire est la différence entre les recettes budgétaires et les dépenses budgétaires, celles-ci correspondant à la consommation de crédits de paiement. La comptabilité en AE est moins importante et parfois moins bien tenue.

D) Les grands principes budgétaires

1) Le principe d’annualité

En application du « principe d’annualité », le budget est voté pour une année. Il autorise la perception des impôts et le paiement des dépenses dans la limite des crédits[2] prévus pour cette année. La loi de règlement approuve le budget exécuté, c’est-à-dire les recettes encaissées et les dépenses décaissées, au cours de cette année.

La comptabilité budgétaire est en effet une « comptabilité de caisse ». Les recettes budgétaires sont enregistrées à la date de leur encaissement et les dépenses budgétaires à la date de leur décaissement.

Autrefois, une « période complémentaire » de plusieurs semaines permettait de considérer des paiements ou des encaissements effectués au début de l’année N+1 comme des dépenses ou des recettes de l’exercice N. Cette période complémentaire n’existe plus.

Toutefois, les crédits non consommés en fin d’année N peuvent, dans certaines limites fixées par la LOLF, faire l’objet de « reports » sur les crédits du même programme pour l’exercice N+1, c’est-à-dire venir majorer les crédits de ce programme votés dans la loi de finances initiale pour N+1 et être ainsi consommés en N+1. Ils sont alors comptabilisés sur l’exercice N+1.

2) Le principe d’unité

Le « principe d’unité » veut que la loi de finances autorise et prévoit toutes les recettes et dépenses de l’Etat dans un document unique.

 

Toutefois, certains « fonds », souvent gérés par la Caisse des dépôts et consignations pour le compte de l’Etat, ont une comptabilité autonome et leurs recettes et dépenses ne figurent pas dans le budget de l’Etat alors que celui-ci les contrôle totalement (par exemple, le fonds national d’aide au logement ou certains fonds destinés à enregistrer les opérations liées aux « investissements d’avenir »). Les dépenses concernées sont ainsi « débudgétisées ».

3) Le principe d’universalité

Le « principe d’universalité » recouvre deux règles : selon la première, il ne doit pas y avoir de « compensation » entre recettes et dépenses ; selon la deuxième, il ne doit pas y avoir « affectation de recettes » à des dépenses particulières.

Toutefois, les comptes spéciaux, les budgets annexes, les fonds de concours et les attributions de produits ont pour objet de permettre une affectation de recettes à des dépenses particulières.

4) Le principe de spécialité

Le « principe de spécialité » impose de préciser dans la loi de finances la nature et l’objet des crédits, ce que permet leur regroupement en titres et en programmes.

5) Le principe de sincérité

Appliqué aux lois de finances initiale et rectificative, le « principe de sincérité » implique l’exhaustivité, la cohérence et l’exactitude des informations fournies dans ces lois et les rapports annexés. S’agissant des recettes, qui sont par nature prévisionnelles, leur sincérité s’apprécie, selon la LOLF, « compte tenu des informations disponibles et des prévisions qui peuvent raisonnablement en découler ».

Pour ce qui concerne les lois de règlement, la LOLF prévoit que « les comptes de l'Etat doivent être réguliers, sincères et donner une image fidèle de son patrimoine et de sa situation financière ». La jurisprudence de la Cour des comptes précise ce que recouvre cette notion de sincérité, inspirée des principes du droit comptable privé.

 

[1]Il existe aussi une comptabilité analytique, mais elle est assez rudimentaire et beaucoup moins utilisée.

[2] Si les crédits sont limitatifs.

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