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FIPECO le 26.05.2023    

Les fiches de l’encyclopédie           III) Programmation et pilotage des finances publiques

               

11) Les lois de financement de la sécurité sociale

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Les lois de financement de la sécurité sociale (LFSS) ont été instituées par la loi constitutionnelle du 22 février 1996 dont les dispositions sont précisées dans une loi organique modifiée en mars 2022. A travers le vote de ces lois de financement, le Parlement détermine les conditions de l’équilibre financier de la sécurité sociale en approuvant ses recettes et en fixant ses objectifs de dépenses, notamment « l’objectif national de dépenses d’assurance maladie » (ONDAM).

Cette fiche présente le champ et le contenu des lois de financement et de leurs annexes, leurs modalités de préparation et de vote ainsi que leurs conditions d’exécution et de contrôle.

A) Le champ et le contenu

1) Le champ

Les lois de financement de la sécurité sociale couvrent les « régimes obligatoires de base de sécurité sociale »[1] ainsi que les « organismes concourant à leur financement » (en pratique, le « fonds de solidarité vieillesse » (FSV)), la « caisse d’amortissement de la dette sociale » (CADES) et le « fonds de réserve pour les retraites » (FRR).

Ces régimes obligatoires de base sont divisés en cinq branches correspondant à des prestations (maladie ; vieillesse ; famille ; accidents du travail et maladies professionnelles ; autonomie) et une branche « recouvrement » gérée par les Urssaf.

Les LFSS ne couvrent donc pas la totalité des « administrations de sécurité sociale », qui constituent un sous-secteur des « administrations publiques » de la comptabilité nationale dont le besoin de financement et l’endettement correspondent au « déficit public » et à la « dette publique » au sens retenu dans les textes européens.

En particulier, les « régimes complémentaires de sécurité sociale », notamment de retraite, et le régime d’indemnisation du chômage (l’Unedic) font partie des administrations de sécurité sociale mais ne sont pas compris dans le champ des lois de financement de la sécurité sociale.

2) Le contenu des lois de financement

La LFSS comprend un article liminaire qui présente les prévisions de dépenses, de recettes et de solde des administrations de sécurité sociale, au sens des comptes nationaux, pour l’année en cours et l’année à venir. Ces prévisions sont identiques à celles du rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finance.

Pour l’année à venir, la LFSS « détermine de manière sincère » les conditions générales de l’équilibre financier de la sécurité sociale. Elle retrace cet équilibre dans des « tableaux d’équilibre ». Elle prévoit les recettes des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, par branche, ainsi que celles des organismes concourant à leur financement.

Elle fixe les objectifs de dépenses des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, par branche, ainsi que l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM) pour l’ensemble des régimes obligatoires de base ainsi que ses sous-objectifs. Elle fixe les charges prévisionnelles des organismes concourant à leur financement.

Elle rectifie, en tant que de besoin, les mêmes tableaux d’équilibre, les prévisions de recettes, les objectifs de dépenses, l’ONDAM et les mêmes éléments des comptes de la CADES, du FSV et du FRR pour l’exercice N. Elle joue ainsi le rôle d’une loi de financement rectificative pour l’exercice en cours. La loi organique prévoit la possibilité de véritables LFSS rectificatives, en plus des rectifications apportées par la LFSS pour l’année suivante, mais elle est rarement utilisée.

Le projet de loi de financement de l'année est accompagné d'un rapport décrivant, pour les quatre années à venir, les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses des régimes obligatoires de base, par branche, les prévisions de recettes et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes ainsi que l'objectif national de dépenses d'assurance maladie. Ce rapport reprend les prévisions et objectifs de la loi de programmation pluriannuelle des finances publiques.

A partir de l’exercice 2022, une « loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale » approuve les « tableaux d’équilibre », par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale pour l’année N-1. Ces tableaux font apparaître le total des recettes, le total des dépenses et le solde. Elle approuve également les tableaux d’équilibre du « régime général de sécurité sociale » (celui des salariés du secteur privé) et du FSV, certains éléments des comptes de la CADES et du FRR ainsi que le montant constaté des dépenses entrant dans le champ de l’ONDAM.

Ces tableaux d’équilibre sont présentés en suivant les règles comptables spécifiques des organismes concernés. Les recettes et dépenses qui y figurent ne sont donc pas directement comparables aux dépenses et recettes des mêmes organismes en comptabilité nationale.

Chaque LFSS comprend enfin de nombreuses autres dispositions relatives aux recettes, aux dépenses, à la trésorerie et à la gestion des organismes de sécurité sociale entrant dans son périmètre.

3) Le contenu des annexes

Plusieurs annexes doivent être jointes au projet de LFSS, notamment les suivantes.

Une annexe présente l’impact financier des mesures nouvelles figurant dans le projet de LFSS pour les trois années à venir.

Une annexe donne la liste des « mesures d’exonération et d’exemption » de cotisations sociales et de contributions à la sécurité sociale, avec leurs principales caractéristiques (coût, compensation éventuelle par l’Etat…). Ces mesures sont parfois désignées par l’expression « niches sociales » et constituent l’équivalent dans le domaine social des « niches fiscales » ou « dépenses fiscales ».

Une annexe explique comment l’ONDAM a été établi, quelles mesures seront prises pour le respecter et comment il s’articule avec la politique de santé publique.

Une annexe présente les perspectives d'évolution des recettes, des dépenses et du solde du régime d'assurance chômage et des régimes de retraite complémentaire légalement obligatoires pour l'année en cours et l'année à venir ainsi que l'impact sur ces perspectives des mesures nouvelles envisagées.

Une annexe présente  la situation financière des établissements de santé et des établissements médico-sociaux financés en tout ou partie par les régimes obligatoires de base de sécurité sociale et soumis à un objectif de dépenses.

En annexe des lois d’approbation des comptes de la sécurité sociale sont présentés des « rapports d’évaluation des politiques de sécurité sociale » (anciennement « programmes de qualité et d’efficience ») pour chaque branche. Ils permettent d’apprécier les résultats de ces politiques au regard des objectifs qui leur sont assignés.

B) La préparation et le vote

1) La préparation

La direction de la sécurité sociale est responsable de la préparation des projets de LFSS. Dans ce cadre, elle coordonne les travaux effectués par les caisses de sécurité sociale et les autres services de l’Etat (direction du budget, direction générale du trésor, direction générale des finances publiques).

Les méthodes de prévision des recettes et de fixation des objectifs de dépenses ainsi que l’organisation institutionnelle mise en place sont décrites dans les fiches relatives à la prévision du produit des prélèvements obligatoires et à la prévision des dépenses publiques.

Les prévisions de recettes et dépenses « tendancielles », c’est-à-dire avant impact des mesures inscrites dans le projet de LFSS, de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale pour l’année passée, l’année en cours et l’année à venir sont soumises à la « commission des comptes de la sécurité sociale » entre le 15 septembre et le 15 octobre. Cette commission rassemble, sous la présidence du ministre chargé de la sécurité sociale, des représentants des organisations syndicales et professionnelles, des régimes de sécurité sociale, des professions de santé ainsi que des personnalités qualifiées. Son secrétaire général, nommé par le Premier président de la Cour des comptes, assure l’organisation de ses travaux et la préparation de ses rapports.

2) L’examen et le vote du Parlement

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale est déposé sur le bureau de l’Assemblée Nationale avant le premier mardi d’octobre. Elle doit se prononcer en première lecture dans un délai de 20 jours puis le Sénat est saisi et doit lui-même se prononcer dans les 15 jours. Le projet de LFSS est ensuite examiné en suivant la procédure accélérée prévue par l’article 45 de la Constitution.

Dans chacune des deux Assemblées, avant d’être examiné en séance plénière, le projet de loi de finances est discuté par la Commission des affaires sociales sur la base d’un rapport de son rapporteur général. Cette commission dispose de pouvoirs étendus d’audition et d’investigation.

Les assemblées examinent et votent, en séance plénière, d’abord les dispositions relatives à l’année en cours, puis les recettes et l’équilibre financier pour l’année à venir et enfin les objectifs de dépenses pour l’année à venir. La loi organique précise les modalités de vote des articles de ces parties successives (vote unique ou votes séparés).

Une part importante des recettes des régimes obligatoires de base de sécurité sociale est constituée d’impôts et taxes affectées par l’Etat. Les règles qui les concernent, notamment leur affectation, devant être fixées en loi de finances, une articulation des procédures d’examen et de vote des lois de finances et des LFSS est nécessaire en principe, mais pas toujours bien assurée en pratique.

Le doit d’amendement des parlementaires est limité par l’article 40 de la Constitution selon lequel « leurs amendements ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l’aggravation d’une charge publique ». La loi organique précise que, s’agissant des LFSS, il faut entendre par « charges publiques » les objectifs de dépenses par branche et l’ONDAM.

C) L’exécution et le contrôle

1) L’exécution des lois de financement

Les lois de financement sont en pratique exécutées par les caisses de sécurité sociale, pour ce qui concerne les dépenses, et l’ACOSS, pour ce qui concerne la majeure partie des recettes.

Ces caisses passent avec l’Etat des « conventions d’objectifs et de gestion » (COG) qui formalisent dans un document contractuel les objectifs à atteindre et les moyens à mettre en œuvre pour améliorer le service rendu aux usagers tout en maîtrisant leurs dépenses de fonctionnement.

S’agissant des recettes, l’ACOSS applique les règles de recouvrement propres à chaque cotisation et contribution qui figurent dans le code de la sécurité sociale et les décrets et arrêtés pris par le gouvernement. Les recettes de nature fiscale sont généralement prélevées par la direction générale des finances publiques du ministère des finances puis transférées à l’ACOSS.

Les caisses qui gèrent les dépenses des branches retraite et famille appliquent aux bénéficiaires des prestations les règles définies par la loi et les règlements. L’autonomie réelle de ces caisses se limite pour l’essentiel aux dépenses d’action sociale.

L’exécution de l’ONDAM présente d’importantes difficultés. D’une part, le dispositif institutionnel de l’assurance maladie, qui fait intervenir notamment l’Etat, les caisses, les agences régionales de santé et les autorités de régulation du marché du médicament, est très complexe. D’autre part, les dépenses de santé résultent de décisions indépendantes prises par les patients et les dizaines de milliers de médecins. La fiche relative à l’ONDAM décrit les instruments de pilotage de celui-ci en cours d’exécution qui ont été mis en place et leur efficacité.

Chaque année, entre le 15 avril et le 15 juin, la commission des comptes de la sécurité sociale examine les nouveaux comptes prévisionnels des organismes de sécurité sociale pour l’année en cours qui sont établis par la direction de la sécurité sociale et les autres administrations qu’elle coordonne. D’importants écarts par rapport aux tableaux d’équilibres de la LFSS peuvent éventuellement conduire le gouvernement à proposer une LFSS rectificative au Parlement.

2) Le contrôle des résultats

Les contrôles de la régularité des dépenses publiques et de la qualité des comptes publics (régularité, sincérité et image fidèle) font l’objet de fiches spécifiques.

Les résultats des régimes obligatoires de sécurité sociale pour un exercice N, outre le contrôle parlementaire exercé au printemps de l’année N+1 dans le cadre du vote de la loi d’approbation des comptes, font l’objet d’un examen par la commission des comptes de la sécurité sociale au cours de ses deux réunions du printemps et de l’automne de l’année N+1.

Le projet de LFSS pour l’exercice N+2 est accompagné d’un rapport de la Cour des comptes sur l’application de la LFSS de l’année N qui est désormais publié avant le projet de loi d’approbation des comptes, qui doit lui-même être déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale avant le 1er juin de l’année N+1. Ce rapport comprend en particulier un avis sur les tableaux d’équilibre des comptes et sur le tableau patrimonial des régimes obligatoires de base. Il contient également une analyse de l’ensemble des comptes des organismes de sécurité sociale soumis au contrôle de la Cour et fait une synthèse des rapports et avis émis par les organismes de contrôle placés sous sa surveillance. Au-delà de ces thèmes imposés par les codes de la sécurité sociale et des juridictions financières, il présente les observations et recommandations de la Cour sur de nombreux sujets relatifs aux administrations de sécurité sociale.

 

[1] Un régime de sécurité sociale se caractérise par une population ainsi que les règles relatives à des prestations sociales dont elle bénéficie et aux modalités de financement de ces prestations. Il existe des régimes obligatoires « de base » et « complémentaires ». Par exemple, pour les salariés du secteur privé, le « régime général » assure les prestations de retraite de base ; l’ARRCO et l’AGIRC les prestations de retraite complémentaires.

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